1989. Tim Berners-Lee, alors physicien au CERN, a une idée : partager des documents grâce à un système de gestion. Nous sommes à l’heure où rien n’existe : ni logiciels ni internet. Pour concrétiser son idée, sa vision, Tim doit alors tout créer. Il invente le World Wide Web (WWW), l’adresse URL et le langage HTML avec une volonté : développer un espace de partage basé sur l’interaction. En 1994, il crée le World Wide Web Consortium (W3C) afin de rendre universelle l’utilisation du web. Il pose les premiers standards de normalisation des outils utilisés par les internautes, puis les normes d’accessibilité du web (WCAG) avec un objectif unique : « This is for everyone » (le web pour tous).
Paradoxalement en France, terre des libertés et de l’égalité, ce principe n’est que peu suivi (certainement parce qu’il est anglo-saxon). Il faut attendre 2005 et des années de combat pour qu’une loi dite de « l’égalité des droits et des chances », oblige les institutions publiques à suivre et appliquer la norme RGAA, déclinaison française de la norme WCAG. Puis 2009 pour que le décret d’application soit voté. Comme toujours en France, tout doit passer par une loi, loi que personne n’applique ou ne respecte, tant que l’on ne nous y contraint pas. C’est donc par une nouvelle loi, plus contraignante et assortie de sanctions, que le public et le privé devront, près de 20 ans après la création du W3C, se rendre accessibles à tous, générant en marge un business du handicap moralement discutable.
L’erreur d’application française du « web pour tous » est de focaliser son objectif, ses lois et ses messages sur le handicap. Ce mot renvoie dans l’inconscient collectif à des déficiences physiques et mentales importantes, et comme pour le mariage pour tous ou la diversité en entreprise, tend à marginaliser donc à exclure. Or selon le Centre National d’Études et de Recherche, le handicap concerne 12 millions de personnes en France, soit 1 français sur 6 ! Une loi ne doit pas vous faire perdre votre bon sens, ne vous coupez pas de vos clients ! Raisonnez ergonomie et simplicité d’usage. Raisonnez comme un Tim Berners-Lee : mettez le Web et ses services à la disposition de tous les individus quel que soit leur matériel, logiciel, leur infrastructure réseau, leur langue maternelle, leur culture, leur localisation géographique ou leurs aptitudes physiques ou mentales.