En juin de l’année 2000, Auchan ouvrait son premier drive baptisé Auchan Express. Le principe était alors pour les clients de pouvoir charger les produits volumineux ou lourds, sans sortir de la voiture, directement dans le coffre. J’ai eu la chance de participer à ce projet expérimental qui était le premier pas de ce qui allait devenir un concept breveté par l’enseigne : Auchan Drive puis, par force de rapprochement, Chronodrive. Bien que le concept fut directement importé des États-Unis, cela n’était encore qu’une innovation en France. Comment savoir si cela marcherait ?
Auchan Express fut d’abord une expérimentation, histoire de tester le concept à moindres frais. Un bâtiment « entrepôt » fut construit à 300m d’un hypermarché existant, sur un terrain appartenant à l’entreprise. Les approvisionnements provenaient à l’origine de la même chaîne logistique, sur un nombre limité de références : 120 au total. L’installation technique fut faite à partir de matériaux de récupération, le logiciel de commande par borne fut conçu sur des écrans tactiles qui ne fonctionnaient pas en plein soleil ou qui prenaient facilement l’humidité, développé rapidement et non connecté au système d’information Auchan. L’équipe de gestion, et celle qui s’occupait du chargement et de l’entreposage, furent constituées des membres de l’équipe projet montée spécialement pour l’expérimentation, entièrement autonome. Des débriefings réguliers permettaient sur la base d’observations et de discussions avec les clients d’améliorer et de faire évoluer le concept. Aujourd’hui Chronodrive compte plus de 70 points de retrait en France, pouvant aller jusqu’à 15000 références, composé d’une équipe de 30 à 50 personnes pour en assurer le fonctionnement.
Les entreprises innovatrices expérimentent d’abord. Elles montent une équipe projet dédiée, acceptent qu’elles soient autonomes et qu’elles fonctionnent de manière artisanale. Elles démarrent sur une version initiale, imparfaite et incomplète de leur concept, qu’elles amélioreront et enrichiront progressivement. Elles industrialiseront ensuite (outils, équipes, compétences…) le concept que lorsque les objectifs auront été atteints. Que ce soit dans les produits ou les services, les grands ou les petits projets, le secteur privé ou public, sortez des carcans organisationnels et des modes de fonctionnement culturels en créant des innovations de rupture… par l’expérimentation.