Je ne suis pas un grand intellectuel, et je déteste les choses compliquées. Aussi quand je dois repenser une organisation – quelle qu’en soit la taille, je la designe toujours le plus logiquement et le plus simplement possible. J’élimine le plus d’étages hiérarchiques, le plus de frontières et le plus d’interfaces que je peux. J’évite les fonctions de responsabilités et de contrôle. Je fuis les instances et les réunions comme la peste. Pour y parvenir, j’ai 2 secrets. Le premier est simple : étant réfractaire à tout système de contrôle et à tout gaspillage de temps, je regarde l’organisation que j’ai imaginé et me pose la question : « est-ce que j’aimerais travailler dans cette société ?« . Le deuxième secret est que je me base sur la coopération, sur l’intelligence humaine. Une intelligence que l’on écoute, qu’on aide à se développer : une intelligence mise au service du collectif.
Aujourd’hui il est de plus en plus difficile d’attirer et de fidéliser le client, de se démarquer de la concurrence et de maintenir ses avantages compétitifs. Pour maîtriser cette complexité, nous multiplions les structures, les systèmes, les process : les interfaces. Comme il faut bien les faire fonctionner et les contrôler, nous multiplions alors les procédures, les reportings, les responsables, les coordinateurs. Le travers – au-delà de multiplier les ressources – est que cela ajoute autant d’obstacles, donc autant de possibilités d’erreurs, d’échecs. Comme cela est plus complexe, il est plus difficile de comprendre d’où proviennent les erreurs, voire de simplement comprendre ce qui se passe. Alors nous multiplions les rapports, les synthèses, les réunions, les plans d’action, les indicateurs, les reportings… Et si malgré toute cette débauche de ressources et de temps, la performance n’est pas au rendez-vous, nous multiplions les coordinateurs, les consultants, les contrôles. Les gens passent alors leur temps en réunion, à préparer des rapports et des reportings. Ils font, défont, refont déstabilisant et rendant d’autant plus complexe une organisation qui n’était déjà pas d’une fluidité exemplaire.
Les gens travaillent de plus en plus dur, de plus en plus longtemps sur des activités à très, très faible valeur ajoutée. Ils passent de 40 à 80% de leur temps à perdre leur temps ! Et plus nous multiplions les systèmes, les contrôles, les indicateurs et les interfaces, plus nous cantonnons les gens dans des activités de plus en plus limitées et abrutissantes, à les rendre obsédés par leur performance individuelle, au lieu de privilégier une bonne et simple coopération. J’entends souvent les managers se plaindre de l’individualisme de leurs collaborateurs. Au lieu de blâmer leurs mentalités, leurs comportements, nous devrions nous demander ce que notre organisation, nos systèmes (dont les fameux systèmes de motivation) ou nos process font pour développer leur intelligence collective, et motiver leur coopération. Et comment, managers et leaders, nous y contribuons.