Kodak a largement fait les frais de sa propension à ne pas tenir compte des signaux d’alarme qui l’avertissait de l’urgence à prendre une décision pour sa survie. Après avoir connu des succès extraordinaires grâce à l’invention du rouleau de film papier, puis celluloïd ainsi que du film couleur, l’entreprise n’a pas voulu croire en l’avenir du numérique et s’est laissée distancer par ses concurrents. Les dirigeants de Kodak étaient convaincus que le film était supérieur au numérique, tout simplement. Leur certitude reposait, entre autres, sur les résultats d’un rapport de 1981 portant sur la menace que pourrait représenter le numérique à l’avenir. Ce rapport concluait en substance que les consommateurs ne seraient pas satisfaits de la qualité médiocre des images numériques ; qu’ils appréciaient par essence de manipuler et de faire circuler des photos ; et que le coût des appareils numériques s’avérerait trop élevé pour un marché de consommation de masse. Si elles reflétaient fidèlement l’environnement sectoriel des années 80, ces conclusions ont par la suite été totalement infirmées par l’évolution technologique rapide des années 90, et plus rapide encore des années 2000.
Si certaines décisions s’avèrent simples, d’autres, en revanche, nécessitent une plus grande implication et génèrent davantage d’émotions et de stress, car elles exercent un impact durable. Dès lors, comment faire les bons choix quand des conséquences majeures sont en jeu ? Comment éviter les pièges liés au processus décisionnel ?
Vous devez d’abord élargir le champ des options possibles, vous affranchir de votre propension à retenir uniquement les informations qui appuient vos hypothèses de départ, prendre de la distance pour ne pas vous laisser envahir par vos émotions et enfin, éviter de pécher par excès de confiance en vous. Utilisez des techniques simples comme :
- le 10-10-10 : cette démarche suppose d’analyser ses décisions en fonction de 3 échéances chronologiques : « Qu’en pensera-t-on dans 10 minutes ? Qu’en pensera-t-on dans 10 mois ? Qu’en pensera-t-on dans 10 ans ? » Cette stratégie vous permettra de prendre du recul.
- les désaccords constructifs : pour ses procédures de canonisation, l’Église catholique prenait autrefois l’avis d’un avocat du diable (le promotor fidei ou défenseur de la Foi), chargé d’argumenter contre le choix du futur canonisé. Toute organisation pourrait également faire appel à un avocat du diable afin de remettre en question ses certitudes.
- le plan rapproché : Xerox a élaboré la stratégie « Focus 500 » pour obtenir un plan rapproché des clients de l’entreprise et identifier les difficultés auxquelles ils étaient confrontés. Les 500 premiers clients de Xerox se sont vu attribuer comme interlocuteur un cadre supérieur de l’entreprise. À chacun des cadres dirigeants incombait la responsabilité de s’occuper d’un client au minimum. Pour qu’ils renouent le contact avec les clients et restent ancrés dans la réalité, Xerox a également demandé à chacun des cadres supérieurs de l’entreprise d’assumer la responsabilité du service Client pendant une journée.